Maroc : la marginalisation criminelle des Amazighs de l’Atlas
A chaque hiver, les Amazighs qui habitent les montagnes de l’Atlas savent qu’ils devront payer le prix le plus fort du fait qu’ils sont les oubliés du Maroc.
Cette année encore en ce début du mois de janvier 2021, une femme enceinte est morte à Imilchil, dans le Haut-Atlas, faute de secours et de soins. C’est un n-ème crime qui vient d’être commis, qui s’ajoutera à la liste déjà longue des victimes des négligences du gouvernement. Sûrs de l’impunité dont ils jouissent, les Caids, les Pachas, les Gouverneurs, les Walis, les Ministres, n’accordent aucune espèce d’importance à la misère des Amazighs de l’Atlas et d’ailleurs.
A chaque hiver les montagnards et les Irehalen (bergers transhumants) ont peur pour leur vie mais également pour celle de leur maigre cheptel, une de leurs rares sources de nourriture et de revenus. Car ils savent que les routes seront coupées pendant des semaines par la neige ou les glissements de terrain, que l’électricité sera interrompue, qu’ils n’auront pas de chauffage, que les denrées alimentaires manqueront et que les autorités ne viendront pas à leur secours. Ils savent aussi que les élus censés les représenter et les défendre au Parlement ne témoigneront même pas de leur détresse car ils sont corrompus notamment par les 40.000 Dirhams d’indemnités mensuelles auxquelles s’ajoutent divers privilèges et avantages en nature.
Face à des phénomènes climatiques saisonniers, on peut se demander légitimement pourquoi le gouvernement ne prévoit pas des moyens adéquats pour faire face aux aléas météorologiques et pour venir en aide aux habitants des territoires de montagne ? Pourquoi des procédures d’urgence sanitaire ne sont pas mobilisées pour éviter les drames ? Pourquoi l'Atlas n'est pas déclaré zone sinistrée et l’état d'urgence décrété lorsque cela s’impose? Pourquoi l’armée n’a pas été réquisitionnée avec ses hommes et son matériel pour dégager les routes, distribuer des vivres et évacuer les patients ? Autant de questions cruciales auxquelles le gouvernement marocain est tenu de répondre, et que les responsables des manquements soient désignés et sanctionnés.
Mais encore une fois, force est de constater que les zones rurales et de montagne habitées majoritairement par des populations amazighes, ne font pas partie des préoccupations du gouvernement, ni des partis politiques obsédés par la course aux élections. Les autorités marocaines ont fait le choix de tout investir dans le riche et lucratif « Maroc utile » symbolisé par le TGV Casablanca-Tanger, tout en tournant le dos à la montagne et aux déserts, ces « Bled-Essiba », territoires pauvres des Amazighs, juste bons pour rapporter les devises du tourisme et pour fournir les ressources naturelles.
La politique marocaine de marginalisation socioéconomique des Amazighs est une forme de discrimination raciale criminelle que le Congrès Mondial Amazigh (CMA) ne cessera jamais de dénoncer.
Dans l’immédiat, le CMA exige une enquête indépendante sur les circonstances de la mort de la femme enceinte de Imilchil et appelle à la mobilisation urgente des ressources de l’Etat pour venir en aide aux familles sinistrées de l’Atlas et des autres massifs montagneux.
Enfin, le CMA interpelle les plus hautes autorités de l’Etat marocain sur la nécessité de mettre un terme à la politique de marginalisation des Amazighs, particulièrement ceux habitant les territoires de montagne et les zones arides.
Paris, 8/01/2971 – 20/01/2021
Le Bureau du CMA.